Dimanche 10 août 2008 : le Grand Direct

Thierry Adam : Mesdames et messieurs bonjour ! Nous sommes le 10 août, il est 7h35, et nous allons suivre le très beau mais difficile périple de Pierrick Bardin au travers de l'Isère et des Hautes Alpes.Nous sommes à La Mure, capitale de la confiture du fruit du même nom, n'est ce pas Jean-Paul ?
Jean-Paul Ollivier : Heu ... Non. Par contre, cette commune a longtemps compté sur l'activité charbonnière, initiée en 1823 par la famille ...
TA : C'est gentil mais on n'a pas le temps. D'ailleurs, ça y est, Pierrick vient de partir. Oh ! Et déjà une attaque ! Quelle vitesse ! Quelle accélération !
Laurent Fignon : C'est peut être parce qu'il est dans une descente non ?
TA : Laurent sur la moto ? Vous me confirmez bien une attaque ?
Laurent Jalabert : non, pas du tout, le parcours du jour a la particularité de commencer par une descente de 5 km qui s'annonce très fraîche, jusqu'au pont de Ponsonnas. Après, il faut attaquer une montée sèche de 2,5 km vers le petit village de Saint Sébastien, autant dire que cette montée à froid et plutôt raide peut avoir un impact important pour la suite.
JPO : Il faut noter qu'à partir de Ponsonnas, nous allons longer un sillon creusé par le Drac sur un vingtaine de km, sans aucune possibilité de traverser jusqu'au barrage du Sautet, superbe ouvrage âgé de plus de 70 ans et dont le bassin versant fait 101 800 hectares et une anedocte, d'ailleurs ...
TA : ttt ttt ttt Jean-Paul, tout ça est très intéressant mais nous devons faire un tour par Paris ...

TA : Voilà, retour sur les routes de l'Isère, Pierrick a achevé sa première heure à 21,8 km/h, c'est plutôt pas mal, non ?
LF : Oui, bon, faut pas s'emballer non plus, les difficultés arrivent seulement en fin de deuxième heure, on verra bien. J'ai gagné 2 tours de France, je sais ce que je dis.
LJ : Moi, je n'ai peut être pas gagné 2 tours, mais j'ai trouvé qu'en dépit d'une moyenne honorable sur la 1ère heure, Pierrick n'a pas trouvé la bonne carburation. Il a cherché à accélérer dans les petites bosses, mais s'est vite rassis, un peu essoufflé, ça n'annonce rien d'engageant. Pour autant, il arrive maintenant dans une zone descendante, aux falaises vertigineuses, mais il faut quand même garder les yeux sur la route car il y a quelques cailloux ...
JPO : Les falaises dont parle Laurent sont celles du défilé de la Souloise, rivière qui a façonné une partie de la région du Dévoluy, dans laquelle Pierrick va entrer, en même temps qu'il rentrera dans le département des Hautes Alpes. Le Dévoluy, région à dominante agricole et agrotouristique,voisine du Champsaur, connu pour ses tourtons.
LJ : Voilà, on est synchrone avec Jean-Paul, Pierrick attaque la 1ère partie de la montée vers le col du Noyer, il s'agit de la montée vers Saint Disdier,il y a un bon vent de face dans ces petites gorges, et Pierrick patine un peu.
TA : Il abandonne même ! Quelle déception, quel dommage !
LF : Heu, non, je crois qu'il s'est arrêté faire un besoin naturel. J'ai quand même gagné 2 tours de France, bon sang !
JPO : Au dessus de Saint Disdier, vous remarquerez sur son promontoire rocheux Mère Eglise, avec sa nef du XIème siècle et son clocher du XIVème siècle ...
TA : C'est là qu'un parachutiste est resté coincé toute une nuit le 06 juin 44 ??? Hihi ! C'est plutôt loin de la Normandie !  Allez, un p'tit coup de pub.

TA : Voilà. Retour sur le parcours, Pierrick a bouclé sa deuxième heure à 18,6 km/h, soit 2 heures à 20,2 km/h et il s'approche du col du Noyer. Laurent sur la moto ?
LJ : Oui, tout à fait, Pierrick a attaqué la vraie ascension du col, avec 6 premiers km à 3%, mais en fait, ce sont 3 km à 6% et 3 km à 1%. Après St Etienne en Dévoluy, face au pic de Bure et Super Dévoluy, là, ça se corse avec 8 km et 400 m de D+, mais il y a une descente de 500 m et surtout, 2 derniers km à 9% !!! Il a trouvé un rythme de pédalage plutôt fluide, mais je crains les incessantes relances des 2 derniers km, dans un cadre lunaire. Il s'agit d'une alternance de replats et de raidards assez durs, s'il n'a pas les jambes, ça va l'achever pour la suite.
JPO : Concernant le col, il est accessible depuis 1850, mais il a perdu sa vocation routière depuis l'ouverture du col du Festre, plus facile pour accéder au Champsaur. Le Tour de France l'a franchi pour la dernière fois en 1982, c'est Pascal Simon qui l'avait franchi en tête. Les autres "vainqueurs" sont Raymond Delisle et Luis Ocana. Ce col est classé en 2ème catégorie.
LJ : Je reprends l'antenne, Pierrick s'est ravitaillé et attaque la descente très prudemment, c'est une descente très raide (7 km et 600 m de D+) et surtout très sinueuse. Pas le temps d'observer le superbe panorama sur le Champsaur. Il va devoir ensuite rejoindre la route Napoléon, en direction de la Mure, bien entendu. Il y aura beaucoup de petites bosses assez usantes entre temps.
TA : Oui, et je suis impressionné de la circulation qu'on y trouve en ce dimanche ! Il n'y a pas de PL, heureusement !
LJ : Oui, et c'est pour ça également que Pierrick va prendre la direction de Saint Firmin et du col des Festreaux (1106 m), plutôt court mais très raide, avec des passages dans des rues du village à plus de 11%.
TA : Ahah ! Pourquoi choisir de tels chemins de chèvres ?
LJ : Tout simplement pour éviter un calvaire dans la côte du Moty, près de 2 km à 12%. Je peux vous assurer que quand on est planté, en pleine chaleur, avec des véhicules qui vous frolent à 90 km/h, il vaut mieux supporter quelques km de plus, mais au calme ...

TA : Et nous retrouvons Pierrick alors qu'il est planté de chez planté dans le col des Festreaux ! Ahah !
LJ : Oh, il y a eu pire ! Il commence à faire très chaud, heureusement, une bonne partie de l'ascension se fait à l'ombre de la forêt, mais de nouveau, il faut relancer, relancer, toujours en danseuse ... Voilà, il passe le col, il a maintenant devant lui une descente de 3 km jusqu'à Aspres les corps, puis 3 km en corniche jusqu'à Corps même. Mais ce n'est qu'après que débutera le plus pénible pour Pierrick, mais pas forcément le plus dur : 25 km de route en plein soleil, toujours en prise. Et il y aura la remontée sur La Mure.
TA : ah, la Mure, toujours la Mure ...
JPO : ...
LF : ...
LJ : ...
TA : allez, une dernière toute petite page de pub et on se retrouve pour le final de l'étape.

LJ : Voilà Pierrick dans les derniers km, il est train de prendre sa revanche sur la mésaventure qu'il avait connue l'année dernière sur un itinéraire semblable : il avait effectué près de 120 km avec un rayon cassé, ce qui l'avait exténué et avait provoqué un trajet Corps/La Mure d'anthologie, obligé qu'il était de s'arrêter toutes les 10 minutes pour se reposer, sans en connaître la raison.
LF : Il aborde maintenant les 4 derniers km, il n'est pas question de cette mésaventure aujourd'hui, il a accompli les 20 derniers km sans problème, enroulant quand il le pouvait, moulinant dans les montées pour ne pas se fatiguer. C'est le secret, je le sais, j'ai gagné 2 tours de France comme ça.
TA : et le voilà dans le dernier km, encore très raide. Il s'est arrêté un peu dans la dernière montée, notamment pour mouiller ses pieds qui avaient tendance à s'échauffer. Mais bon, moi, je le dis, même si ça peut paraître chauvin, c'est un coureur français, c'est bien ce qu'il a fait, il a tenté, c'est déjà ça. Regardez le, il est tellement content qu'il salut la foule.
LJ : Heu non, je crois qu'il fait des étirements pour ses épaules ... Cela étant, il s'est sorti de ce piège mais il y a laissé des plumes, les routes du Trièves et du Dévoluy ne laissent décidement pas de place à l'improvisation.

Itinéraire : La Mure, Pont de Ponsonnas, St Sébastien, Cordéac, Croix de la Pigne, Pellafol, St Disidier, St Etienne en Dévoluy, Triziaud, Col du Noyer (1664 m), La Guinguette, Chauffayer, St Firmin, Col des Festreaux (1106 m), Aspres les Corps, Corps, La Salle en Beaumont, La Mure.
105 km en 5h11', à 20,3 km/h. 2400 m de D+.